Le 28 février 2018, Euralia et Shan organisaient un petit-déjeuner débat portant sur l’Europe et les Etats généraux de l’alimentation. Michel DANTIN, député européen (PPE), Franck GERETZHUBER, secrétaire général d’Auchan Retail et Alexis DEGOUY, directeur des affaires publiques de l’Association nationale des industries alimentaire (ANIA), ont chacun fait part de leur analyse sur la place de l’Europe dans les Etats généraux de l’alimentation (EGA). Le débat était animé par Didier SALLÉ, PDG d’Euralia, et Amaury BESSARD, Directeur du pôle sectoriel Agriculture et Agroalimentaire de SHAN.
Selon Michel DANTIN, député européen (PPE), l’Europe a été peu présente lors des EGA. Il prend l’exemple du discours de Rungis du Président de la République le 11 octobre 2017 au cours duquel l’Union européenne et ses politiques n’ont pas été évoquées alors que ce discours avait lieu la veille du dernier trilogue sur le règlement Omnibus comportant un certain nombre de mesures importantes pour le monde agricole, notamment en ce qui concerne les prérogatives des organisations de producteurs.
Jean BIZET, président de la commission des affaires européennes du Sénat, a souligné que les EGA n’ont pas traité de l’article 42 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) qui prévoit que l’applicabilité des articles généraux concernant la concurrence était assujettie à la réserve des dispositions spécifiques de la politique agricole commune.
Les intervenants ont globalement constaté un manque de prise en compte du contexte international dans lequel les secteurs agricoles et agroalimentaires se situent, rappelant que l’Union européenne représente 66% des échanges pour les industries alimentaires françaises.
Toutefois, selon Alexis DEGOUY, si les débats des EGA ont été très franco-français, c’est aussi parce que de nombreux sujets sont franco-français comme la fiscalité ou la compétitivité. Le représentant de l’ANIA estime également que les spécificités de l’agroalimentaire français ne sont pas prises en compte au niveau de l’Union européenne.
La nécessité de s’inscrire dans le temps européen a été rappelée. En effet, en matière agricole, l’Union européenne légifère par la voie de règlements qui sont d’application directe pour les Etats membres. Michel DANTIN s’inquiète ainsi de certaines dispositions du projet de loi post EGA contraires au règlement Omnibus en application depuis le 1er janvier 2018.
Les eurodéputés français n’ont pas été invités aux EGA à de rares exceptions près. Or, pour l’eurodéputé, il convient de s’inspirer des pratiques commerciales de nos voisins européens avant de légiférer en France à l’instar de ce qui a été réalisé, par exemple, en Espagne.
Franck GERETZHUBER, secrétaire général d’Auchan Retail, considère que l’Europe a oublié l’agriculture française, notamment en imposant la dérégulation des marchés. Selon lui, L’Union européenne devrait plutôt, s’appuyant sur la démarche menée par le gouvernement français dans le cadre des EGA, s’adapter aux nouvelles exigences des consommateurs pour soutenir fortement la transition alimentaire.
Mettant en avant le diagnostic partagé de l’ensemble de la filière en amont des EGA, les intervenants estiment que les Etats européens pourraient s’en inspirer.
Parmi les enjeux pour l’avenir, la nécessité pour la France d’être présente à Bruxelles, notamment par l’intermédiaire de son ministre de l’agriculture, a été rappelée avec force.
De nombreux acteurs incitent l’Union européenne à réorienter la PAC vers une place moins prépondérante du marché mais également une prise en compte accrue de la transition alimentaire, tant en termes de qualité que de respect de l’environnement.
Alors que certains intervenants souhaitent que la démarche des EGA se généralise, la Commission a annoncé dans son nouveau programme de travail, la publication au premier trimestre 2018, une initiative législative visant à améliorer la chaine d’approvisionnement alimentaire.
Là encore cette initiative européenne pourtant précédée d’une consultation largement ouverte n’a jamais été évoquée lors des EGA.